Le 29 juin 2023, à l’occasion de l’examen du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice pour 2023-2027, Jérémie Iordanoff a voté contre l’activation à distance des téléphones portables à l’insu de leurs propriétaires,  aux fins de captations de sons et d’images. 

Les écoutes reposaient jusqu’à présent sur la mise en place par les services d’enquête  de dispositifs techniques sur des véhicules ou dans des lieux publics ou privés. Ce mode opératoire aurait néanmoins perdu de son efficacité face à des délinquants qui ont appris à s’en prémunir. La technique envisagée a ceci d’original qu’elle évite aux enquêteurs d’avoir à s’introduire dans des lieux privés pour mettre en place des dispositifs de captation.  

Mais, si l’on peut aisément admettre que ce procédé renforce l’efficacité de l’enquête, il porte indéniablement atteinte au droit au respect de la vie privée en permettant l’enregistrement en tout lieu, des paroles et des images qui peuvent concerner aussi bien les personnes visées par les investigations que les tiers. 

Jérémie Iordanoff a donc suggéré que des garanties soient apportées pour assurer une conciliation plus équilibrée entre l’objectif de recherche des auteurs d’infractions et le droit au respect de la vie privée. Ses propositions ont néanmoins toutes été rejetées par le rapporteur. 

Fort heureusement, le 16 novembre 2023, le Conseil constitutionnel, saisi notamment par le groupe écologiste sur le fondement de l’article 61 de la Constitution*, a censuré le dispositif comme étant contraire à la liberté consacrée à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui implique le droit au respect de la vie privée.

Dans un Etat de droit qui se respecte, la défense des libertés ne saurait dépendre de l’état des rapports de force politique. 

 

* Depuis la célèbre décision Liberté d’association de 1971, le Conseil constitutionnel assure le contrôle des lois au regard des droits et libertés auxquels renvoie le Préambule de la constitution de 1958. Les libertés consacrées dans la DDHC de 1789 en font partie.  La saisine du Conseil constitutionnel, qui est facultative pour les lois ordinaires, est assurée par des autorités politiques lorsqu’elle a lieu avant la promulgation de la loi (Constitution, article 61). Depuis la révision constitutionnelle de 1974, le Conseil peut être saisi par l’opposition parlementaire (60 députés ou 60 sénateurs). Une décision déclarant une loi inconstitutionnelle fait obstacle à sa promulgation.