Lettre ouverte à Laurent Wauquiez
Il y a une semaine, Laurent Wauquiez s’en prenait violemment à l’Office français de la biodiversité (OFB) dans une lettre adressée aux 45 000 agriculteurs de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, allant jusqu’à demander son démantèlement. Face à ces attaques injustifiées, les élus écologistes du Parlement et de la Région ont souhaité réagir avec fermeté à travers une lettre ouverte.
Dans cette lettre, Jérémie Iordanoff et ses co-signataires dénoncent ces propos irresponsables qui instrumentalisent la question environnementale à des fins électoralistes, attisent les tensions au sein du monde agricole et remettent en cause le travail des agents qui appliquent la loi républicaine.
Le vendredi 28 février 2025
Monsieur Laurent Wauquiez,
Par votre lettre envoyée aux 45 000 exploitants agricoles de la Région Auvergne-Rhône- Alpes, vous avez une nouvelle fois choisi d’attaquer violemment l’Office français de la biodiversité (OFB), qualifié de « coalition d’idéologues » et de coupable de « contrôles absurdes » visant à « empêcher les agriculteurs de travailler sereinement. Un tel discours ne fait rien d’autre qu’inciter à la haine et à la violence contre des agents publics qui exercent leur mission dans le respect des lois de la République.
Cette lettre ne se contente pas de critiquer des actions menées par l’OFB. Elle fait la promotion d’une logique de division et de confrontation, dans le seul but de nourrir des ambitions électorales à court terme. Vous semblez vouloir capter l’attention à l’approche du
Congrès des Républicains, au mépris de l’intérêt général et des principes républicains. Mais, les agriculteurs ne sont pas dupes de vos manœuvres politiciennes. Ils sont même nombreux à signer une lettre ouverte contre votre initiative, dénoncent cette instrumentalisation et rappellent que leur priorité est avant tout de vivre dignement de leur travail, et non d’entrer dans des combats politiques vains et destructeurs. Ils savent l’importance de l’écologie dans leur pratique agricole.
L’OFB, loin d’être cet organisme idéologique que vous décrivez, accomplit une mission essentielle pour la préservation de notre biodiversité et, in fine, de notre agriculture elle-même. Ses agents, qui relèvent à la fois de la police administrative et de la police judiciaire, agissent sous l’autorité des préfets et des procureurs, et non selon une quelconque ligne militante comme vous l’insinuez. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : sur les 21 635 contrôles administratifs réalisés en 2023, seulement 2 759 concernaient le monde agricole, soit une minorité des interventions. En matière judiciaire, 1 273 procédures ont été engagées, soit une moyenne de 13 par département. Il est donc fallacieux de parler, comme vous le faites, de harcèlement ciblé contre les agriculteurs.
Vos déclarations et votre demande de dissolution de l’OFB sont idéologiques et dangereuses. Elles fragilisent le travail des agents qui agissent pour l’intérêt général et jettent l’opprobre sur des fonctionnaires qui ne font qu’appliquer les règles.
Vous proposez une aide juridique en cas de litige avec l’OFB, feriez-vous de même pour toute autre infraction à la loi constatée par un service et des agents assermentés de l’État ? L’État de droit est-il à géométrie variable ? Comment un député peut-il encourager les citoyens à enfreindre la loi et leur proposer son soutien ? Cela n’est pas sérieux.
Alors que notre agriculture fait face à des défis immenses – changement climatique, crise sanitaire, concurrence internationale exacerbée – le rôle d’un élu responsable devrait être d’apporter des solutions concrètes plutôt que d’attiser les tensions et de désigner des boucs émissaires. Au lieu de vous livrer à une surenchère idéologique, pourquoi ne pas défendre un modèle agricole durable et résilient, qui valorise les pratiques agroécologiques et protège les ressources naturelles indispensables à l’avenir de notre pays ?
Madame la ministre de l’Agriculture Annie Genevard, Madame la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher, il est désormais impératif de réagir face à de telles dérives. L’incitation à la défiance envers un organisme public et ses agents ne peut rester sans réponse.
La République ne peut tolérer que ses principes fondamentaux soient piétinés par un élu qui instrumentalise la question environnementale à des fins politiciennes. Ne laissons pas prospérer ce discours de division. Il faut continuer, plus que jamais, à défendre la protection de notre environnement contre ceux qui, par calcul politique, cherchent des boucs émissaires et sèment la discorde.
Copie à :
Madame la ministre Annie Genevard
Madame la ministre Agnès Pannier-Runacher
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Jérémie Iordanoff
Député de l’Isère, Vice-président de l’Assemblée-nationale
Cyrielle Chatelain
Députée de l’Isère
Nicolas Bonnet
Député du Puy-de-Dôme
Marie-Charlotte Garin
Députée du Rhône
Marie Pochon
Députée de la Drôme
Boris Tavernier
Député du Rhône
Guillaume Gontard
Sénateur de l’Isère
Thomas Dossus
Sénateur du Rhône
Raymonde Poncet Monge
Sénatrice du Rhône
Maxime Meyer
Conseiller régional de l’Ain, Co-président du groupe écologiste à la Région AURA
Cécile Michel
Conseillère régionale du Rhône, Co-présidente du groupe écologiste à la Région AURA